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Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/227

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jouir d’une femme, c’eſt à la bouche de la ſuivante à réparer ce déſordre ; veut-il être excité, c’eſt le ſoin de cette malheureuſe, elle l’accompagne en tout lieu, l’habille, le déshabille, le ſert en un mot dans tous les inſtans, a toujours tort, & eſt toujours battue ; aux ſoupers, ſa place eſt, ou derriere la chaiſe de ſon maître, ou comme un chien à ſes pieds, ſous la table, ou à genoux, entre ſes cuiſſes, l’excitant de ſa bouche ; quelquefois elle lui ſert de ſiége ou de flambeau ; d’autres fois elles ſeront toutes quatre placées autour de la table dans les attitudes les plus luxurieuſes, mais en même temps les plus gênantes.

» Si elles perdent l’équilibre, elles riſquent, ou de tomber ſur des épines qui ſont placées près de-là, ou de ſe caſſer un membre, ou même de ſe tuer, ce qui n’eſt pas ſans exemple ; & pendant ce temps les ſcélérats ſe réjouiſſent, font débauche, s’enivrent à loiſir de mets, de vins, de luxure & de cruauté. — Oh Ciel ! dis-je à ma compagne, en frémiſſant d’horreur, peut-on ſe porter à de tels excès ! Quel enfer ! — Écoute, Théreſe, écoute, mon enfant, tu es loin de ſavoir encore tout, dit Omphale. L’état de groſſeſſe révéré dans le monde eſt une certitude de réprobation parmi ces infâmes, il ne diſpenſe ni des punitions, ni des gardes ; il eſt au contraire un véhicule aux peines, aux humiliations, aux chagrins ; combien de fois eſt-ce à force de coups qu’ils font

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