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Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/242

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rempliſſaient de pleurs ; il me retourne, me fait agenouiller ſur le bord d’une chaiſe dont mes mains doivent tenir le doſſier ſans ſe déranger une minute, ſous les peines les plus graves ; me voyant enfin là, bien à ſa portée, il ordonne à Armande de lui apporter des verges, elle lui en préſente une poignée mince & longue ; Clément les ſaiſit, & me recommandant de ne pas bouger, il débute par une vingtaine de coups ſur mes épaules & ſur le haut de mes reins ; il me quitte un inſtant, revient prendre Armande & la place à ſix pieds de moi, également à genoux, ſur le bord d’une chaiſe ; il nous déclare qu’il va nous fouetter toutes deux enſemble, & que la premiere des deux qui lâchera la chaiſe, pouſſera un cri, ou verſera une larme ſera ſur-le-champ ſoumiſe par lui à tel ſupplice que bon lui ſemblera : il donne à Armande le même nombre de coups qu’il vient de m’appliquer, & poſitivement ſur les mêmes endroits ; il me reprend, il baiſe tout ce qu’il vient de moleſter, & levant ſes verges, — tiens-toi bien, Coquine, me dit-il, tu vas être traitée comme la derniere des miſérables. Je reçois à ces mots cinquante coups, mais qui ne prennent que depuis le milieu des épaules juſqu’à la chute des reins incluſivement. Il vole à ma camarade & la traite de même : nous ne prononcions pas une parole, on n’entendait que quelques gémiſſemens ſourds & con-