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Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/333

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l’être aux humains par des voies meilleures & plus ſages, par des moyens, en un mot, qui nous euſſent évité le fléau des femmes ? Je vois ces mêmes Peuples, les Grecs, tenir ce ſexe dans un tel mépris qu’il faut des loix pour obliger un Spartiate à la propagation, & qu’une des peines de ces ſages Républiques eſt de contraindre un malfaiteur à s’habiller en femme, c’eſt-à-dire, à ſe revêtir comme l’être le plus vil & le plus mépriſé qu’elles connaiſſent.

Mais ſans aller chercher des exemples dans des ſiecles ſi loin de nous, de quel œil ce malheureux ſexe eſt-il vu même encore ſur la ſurface du globe ? Comment y eſt-il traité ? Je le vois, enfermé dans toute l’Aſie, y ſervir en eſclave aux caprices barbares d’un deſpote qui le moleſte, qui le tourmente, & qui ſe fait un jeu de ſes douleurs. En Amérique, je vois des Peuples naturellement humains, les Eskimaux, pratiquer entre hommes tous les actes poſſibles de bienfaiſance, & traiter les femmes avec toute la dureté imaginable : je les vois humiliées, proſtituées aux étrangers dans une partie de l’Univers y ſervir de monnoie dans une autre. En Afrique, bien plus avilies ſans doute, je les vois exerçant le métier de bêtes-de-ſomme, labourer la terre, l’enſemencer, & ne ſervir leurs maris qu’à genoux. Suivrai-je le Capitaine Cook dans ſes nouvelles découvertes ? L’île charmante d’Otaïti, où la groſſeſſe eſt un crime

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