Aller au contenu

Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/379

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 83 )


land profite des ſuccès de cette premiere ſecouſſe ; ſes efforts deviennent plus violens ; il gagne du terrain ; à meſure qu’il avance, le fatal cordon qu’il m’a paſſé autour du cou ſe reſſerre, je pouſſe des hurlemens épouvantables ; le feroce Roland qu’ils amuſent m’engage à les redoubler, trop sûr de leur inſuffiſance trop maître de les arrêter quand il le voudra ; il s’enflamme à leurs ſons aigus ; cependant l’ivreſſe eſt prête à s’emparer de lui, les compreſſions du cordon ſe modulent ſur les degrés de ſon plaiſir ; peu-à-peu mon organe s’éteint ; les ſerremens alors deviennent ſi vifs que mes ſens s’affaibliſſent ſans perdre néanmoins la ſenſibilité ; rudement ſecouée par le membre énorme dont Roland déchire, mes entrailles, malgré l’affreux état dans lequel je ſuis, je me ſens inondée des jets de ſa luxure ; j’entends encore les cris qu’il pouſſe en les verſant ; un inſtant de ſtupidité ſuccéda, je ne ſais ce que je devins, mais bientôt mes yeux ſe r’ouvrent à la lumiere, je me trouve libre, dégagée, & mes organes ſemblent renaître. — Eh bien ! Théreſe, me dit mon bourreau, je gage que ſi tu veux être vraie, tu n’as ſenti que du plaiſir ? — Que de l’horreur, Monſieur, que des dégoûts, que des angoiſſes & du déſeſpoir. — Tu me trompes, je connais les effets que tu viens d’éprouver, mais quels qu’ils ayent été, que m’importe, tu dois, je l’imagine, me connaître aſſez pour être bien

F 2