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Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/129

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LA MARQUISE DE GANGE

certain des récompenses dont l’Eternel doit un jour couronner ses vertus ? Et cette respectable mère, ne voulant pas donner l’air d’un reproche que ne méritait point sa fille, à de simples conseils qu’elle lui adressait, se contenta de quelques avis subséquents que la marquise reçut avec les larmes de la reconnaissance.

— Mon frère, dit Théodore à Alphonse, pendant le séjour de madame de Châteaublanc à Gange, je n’aime pas cette femme-là : elle a la confiance de sa fille beaucoup plus que nous. Si ta femme hérite de madame de Nochères, comme cela paraît certain, tu verras qu’Euphrasie fera avec sa mère quelque arrangement qui nous empêchera de jouir de cette immense fortune jusqu’à la majorité de l’enfant. — C’est un motif pour la ménager, dit le marquis. — Cela en serait un pour la perdre, si nous en avions le courage. — Mais, mon ami, ce n’est pas au moment où je me raccommode avec sa fille… où j’aime plus que jamais cette chère épouse ; ce n’est pas, dis-je, dans ce moment-là que j’irai causer à Euphrasie le douloureux chagrin de la priver de sa mère. — Mon cher Alphonse, dit Théodore, je te vois toujours raisonner mal, toutes les fois qu’il s’agit de tes intérêts. Quel rapport y a-t-il entre cette mère et sa fille relativement à toi ? En te mariant avec l’une, as-tu épousé l’autre ? Et n’arrive-t-il pas tous les jours qu’on adore la fille, tout en