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Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/225

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LA MARQUISE DE GANGE

sage que toi, mon cher, voilà ma seule excuse ; mais ne trouves-tu pas Alphonse un peu froid avec elle depuis notre retour de Gange ? — Je l’ai remarqué comme toi : le marquis revient difficilement de ses premières impressions. D’ailleurs, cette succession lui donne de l’inquiétude ; et, dans le fait, sais-tu qu’elle donne beaucoup à réfléchir ? Tant que cette femme ne bougera pas, rien à craindre ; mais si elle prend des précautions, et sois sûr que sa mère lui en fera prendre, si elle en prend, dis-je, nous ne pourrons seulement pas manger cent louis là-dessus ; et il est dur, à notre âge, de nous trouver tous deux à la pension d’un frère, qui, quelque loyalement qu’il agisse, est loin cependant de satisfaire à nos désirs. Qu’inventer, mon cher Théodore, pour empêcher cette femme de s’emparer de tout cela en faveur de son fils ? — Ma foi, dit l’abbé, je n’y vois qu’une chose, c’est de multiplier les pièges sous les pas d’Euphrasie, en nous cachant tellement que nous ne puissions jamais être soupçonnés. Il faut que les chutes inévitables que nous lui ferons faire aiguillonnent plus fortement que jamais la jalousie du marquis ; que l’éclat dont nous environnerons ces chutes perdent sa femme de réputation, et que le marquis, la voyant toujours coupable et se déshonorant à chaque pas, devienne contraint, par cette série de torts, à lui faire juridiquement enlever toute disposi-