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Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/303

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LA MARQUISE DE GANGE

pouvait lui faire faire de postérieur. En ne le faisant pas, elle retombait dans tous les malheurs dont elle était à peine délivrée : elle se crut donc, d’après cela, très permis d’acheter à ce prix la permanence d’une tranquillité qui ne coûtait rien à sa délicatesse : tous les torts de cette aventure appartenaient au chevalier qui oubliait, mais aucun à l’épouse qui contractait ; l’un faisait une sottise, l’autre n’usait que d’une précaution absolument nécessaire à son repos.

Nous devions cette justification à la femme la plus malheureuse, et en même temps la plus respectable ; et, puisque rien ne nous l’indique, nous sommes contraints à la tirer de la vraisemblance de son cœur et de notre impartialité. Mais tout cela ne parut pas si simple à l’abbé, à son retour d’une campagne où il avait été passer quelques jours.

— Tu es un sot, dit-il à son frère, ce que nous tenons n’est bon qu’à jeter au feu ; Euphrasie s’est moquée de nous ; il faut lui demander la rétractation de l’acte public fait à Avignon, et prendre un parti très violent si elle le refuse : car alors elle révèle ta proposition, met sur le bureau l’acte qui en est la suite et nous fait passer pour des suborneurs. Elle et sa mère ont maintenant de terribles armes contre nous. Ceci ressemble à ces dernières parties où l’on joue le tout pour le tout : il faut que l’un des deux soit