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Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/97

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LA MARQUISE DE GANGE

reverrons plus. Ici, madame de Roquefeuille apprit à son amie ce qui s’était passée relativement à ce bon religieux. — Mais qui peut être cause de cette retraite précipitée ? — Je l’ignore. Eusèbe est parti sans dire mot, sans voir qui que ce soit ; on prétend qu’il est redemandé par ses supérieurs. Alors la marquise tomba dans quelques réflexions ; puis, reprenant avec inquiétude et douleur : — Hélas ! dit-elle à son amie, n’ayant plus d’autres conseils que les vôtres, je n’écouterai maintenant qu’eux seuls. Hé bien ! il faut s’y résoudre ; j’attendrai tout du temps. — C’est le seul remède à vos maux. — Ah ! s’il s’écoule trop lentement, le chagrin aigrira mes douleurs, les larmes flétriront ces faibles attraits qui le captivèrent, et mon espoir s’anéantira avec eux… Oh ! ma chère dame, que je suis malheureuse !

Ici la conversation fut interrompue par l’arrivée d’Ambroisine, qui venait supplier sa mère de se prêter au vœu général de la société, dont le projet était d’aller passer quelques jours à la foire de Beaucaire, et qui désirait de partir tout de suite. — Cela m’est impossible, dit madame de Roquefeuille, des affaires essentielles m’appellent à Montpellier ; je vous accompagnerai jusque-là ; mais je vous laisserai ma fille, dit-elle à madame de Gange ; c’est à vous que je la confie, et je ne veux pas lui faire le mauvais tour de l’enlever à ses amis, pour venir s’ennuyer de mes affaires.