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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/298

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vement à nous amuser de cette fille, et à mettre les cinq cents mille francs dans ma poche. Ses raisonnemens, sur cet objet, me persuadèrent tellement que je ne puis m’empêcher de vous les répéter : il est bon de vous prévenir que j’avais l’air de balancer, pour qu’il s’ouvrît davantage à moi. Voici donc comme il combattit mes objections simulées, un soir que je soupais dans sa petite maison de la Barrière-Blanche.

Quand on a deux raisons pour faire une chose, Juliette, me dit-il, et aucune pour ne la pas faire, je vous avoue qu’il me paraît incroyable d’entendre demander si on la fera : quand on a trente ans, de l’esprit, point de préjugé, plus de religion, plus de Dieu, aucun remords, la plus grande habitude du crime, beaucoup d’intérêt à faire cette chose, je vous avoue encore qu’il me paraît très-singulier d’entendre demander si on fera cette chose ou non. Quand on a dans sa main tout ce qu’il faut pour opérer, que l’on a déjà fait des choses plus fortes, qu’on a trouvé du plaisir à les faire, que l’on a été vivement chatouillé de ce plaisir, je vous avoue franchement encore, lorsque la même dose de plaisir et une beaucoup plus grande d’intérêt s’y trouvent, qu’il me paraît très-