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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/95

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à quel point est portée maintenant la dépravation humaine ! tous d’une voix unanime nous supplièrent de leur faire part de nos funestes dons, et il n’y en eut pas un seul qui n’eût, selon lui, les meilleures distributions à en faire. Ils en eurent tous ; et cette libidineuse soirée nous rendit peut-être la cause d’une soixantaine de meurtres.

Allons, me dit la Durand, il n’est pas tard, nous pouvons courir encore : d’ailleurs, il faut que j’aille absolument m’assurer du succès de la mort de ma jolie petite fille de quinze ans. Nous quittâmes donc nos convives, après les avoir embrassés : à peine fûmes-nous sur la place de la cathédrale, que nous vîmes passer un enterrement. La coutume étant en Italie de porter les morts à visage découvert, il fut facile à la Durand de reconnaître les traits de la jolie fille dont elle voulait vérifier la mort… La voilà… la voilà, me dit-elle précipitamment. Oh foutre ! branlons-nous dans un coin, en la voyant passer : non, dis-je, il vaut mieux la devancer à la cathédrale ; nous nous cacherons dans une chapelle, où nous ferons ce que tu dis, en la voyant descendre au tombeau… Tu as raison, dit Durand, le