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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/11

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trois lignes que je vais vous dicter, et dans peu d’heures je vous amène votre amant.

Voici les mots que la belle aventurière écrivit sous ma dictée : « Un brave inconnu va vous mettre à même de vous convaincre de mes malheurs ; ils sont affreux ; suivez-le, il vous mènera où je vous attends ; mais venez seul, absolument seul, cette recommandation est essentielle ; vous saurez bientôt ce qui la motive ; si deux mille sequins ne vous paraissent pas une trop faible récompense pour l’homme qui nous réunit, apportez-les pour les lui remettre devant moi ; vous en apporterez davantage, si vous trouvez la récompense trop médiocre ».

La belle opprimée, qui se nommait Héloïse, signa le billet, et moi, regagnant promptement ma voiture, j’engage le postillon à faire diligence, et le fais arrêter à la porte même du jeune Alberoni, amant d’Héloïse. Je lui présente le billet. Deux mille sequins ! s’écrie-t-il en m’embrassant, deux mille sequins pour savoir des nouvelles de tout ce j’ai de plus cher au monde ! oh ! non, non, monsieur, ce n’est point assez, voilà le double ; partons, je vous en conjure ; je venais d’apprendre le départ de celle que j’aime, la colère de son