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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/25

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leur qu’éprouva cette malheureuse ; jamais, je crois, la nature ne fut plus éloquente ni plus pathétique ; et, reversiblement, jamais plus voluptueuses impressions n’ébranlèrent mes organes. Revenue à elle, cette femme me donna toute sa confiance ; on la débarqua dans un état affreux ; je me logeai dans la même auberge : sentant sa fin approcher, elle me remit son porte-feuille, en me priant de le faire repasser à sa famille ; je promis tout, et ne tins rien. Six cent mille francs que contenait ce porte-feuille étaient un objet assez considérable pour, qu’avec mes principes, je ne les laissasse pas échapper ; et la malheureuse Napolitaine, qui mourut le surlendemain de notre arrivée à Messine, m’en laissa bientôt jouir tranquillement. Je n’eus qu’un regret, je l’avoue ; ce fut de ne l’avoir pas foutue avant sa mort ; belle encore, et très-malheureuse, elle m’en avait inspiré le plus violent desir ; mais j’eus peur de perdre sa confiance ; et, dans cette occasion, je l’avoue, où il ne s’agissait que d’une femme, l’avarice l’emporta sur la luxure.

Je n’avais d’autres recommandations, à Messine, que les lettres-de-change dont je m’étais munies à Venise, où j’avais pris la