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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/56

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on se trouve est nul, ou indifférent par lui-même, pourquoi craindre d’adopter plutôt l’un que l’autre ? et pourquoi s’étonner, s’affliger, je le suppose, du parti que l’on prend d’être méchant, quand tout nous y porte, et quand cela se trouve foncièrement égal ? Quel est l’être qui pourra me prouver qu’il est mieux de rendre les autres heureux que de les tourmenter ! Mettons, pour un moment, à part le plaisir que je puis prendre à me conduire de l’une ou de l’autre manière ; est-il essentiellement utile que les autres soient heureux ? et si cela ne l’est pas, pourquoi me gênerai-je, en les accablant d’infortunes ? Il me semble qu’il ne s’agit dans tout cela que de ce que je dois éprouver à l’une ou à l’autre action ; car, étant, par la nature, spécialement chargé de mon bonheur, et nullement de celui des autres, je n’aurai tort vis-à-vis d’elle que dans le cas où j’aurais négligé de me délecter d’après ses vues et d’après ses plans. Ce même être, que mes goûts ou mes violences rendent malheureux, parce qu’il est le plus faible avec moi, jouira de sa force avec un autre, et tout deviendra égal. Le chat détruit la souris, et est lui-même dévoré par d’autres animaux. Ce n’est absolument