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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/79

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j’y eus produit ce terrible évènement, et sentant qu’il n’était plus rien au monde qui pût m’y fixer à l’avenir, je mis mon bien en vente après avoir égorgé tous les sujets de mon sérail, et Clémentia elle-même, malgré son extrême attachement pour moi ; frappée de ma barbarie et de mon ingratitude, surprise de me voir lui reserver avec recherche un plus affreux supplice qu’aux autres, elle osa m’adresser des reproches. O Clémentia, lui dis-je, que tu connais mal le cœur d’un libertin tel que moi, dès que tu ne t’es pas déliée du sort que je te préparais ! ne sais-tu donc pas que la reconnaissance dont tu crois surcharger mon ame, ne devient sur ses ressorts usés, qu’un véhicule de plus pour les diriger vers le crime ; et que, si j’éprouve, en t’immolant, quelque chagrin ou quelque remords, c’est de ne t’en pouvoir faire assez, elle mourut sous mes yeux et je déchargeai violemment.

Je m’embarquai pour l’Afrique avec le projet de m’associer aux barbares de ces affreux cantons, pour devenir, si je le pouvais, mille fois encore plus féroces qu’eux.

Mais, c’est ici où l’inconstance du sort voulut me convaincre, en me faisant éprouver ses revers, que si sa main favorise presque