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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 4, 1797.djvu/41

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nous accordent, on le voit, que l’ame a une extension, qu’elle est divisible, qu’elle a des parties ; c’en est suffisamment pour nous porter à croire que ceux-là même qui soutiennent son immortalité, ne sont pas fort convaincus de sa spiritualité, et que cette opinion est insoutenable : il est tems de vous en convaincre.

Qui dit une substance spirituelle, dit un être actif, pénétrant, sans que, dans le corps qu’il pénètre, on apperçoive aucun vestige de son passage ; notre ame est telle dans cette hypothèse : elle voit sans regarder, elle entend sans prêter l’oreille, elle nous meut sans se mouvoir elle-même : or, un tel être ne peut exister sans renverser l’ordre social.

Pour le prouver, je demande de quelle manière voyent les ames ? Les uns ont répondu que les ames voyaient tout dans la divinité, comme dans un miroir où se réfléchissent les objets ; les autres ont dit que la connaissance leur était aussi naturelle que les autres qualités dont elles sont pourvues. Assurément si la première de ces opinions est absurde, on peut bien assurer que la seconde l’est pour le moins autant ; et, en effet, n’est-il pas impossible de comprendre comment une ame