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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/19

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des autres, sans nous empêcher de rien voir, je retombe dans les bras d’Elvire presqu’autant agitée que moi : nous nous branlons à la lueur des flammes homicides, qu’allumait ma férocité… aux cris aigus du malheur et du désespoir que faisait pousser ma luxure, et j’étais la plus heureuse des femmes.

Nous nous levons enfin pour analiser mon forfait : je vois avec douleur que deux victimes me sont échappées ; je reconnais les autres cadavres, je les retourne avec le pied : ces individus vivaient ce matin, me dis-je… J’ai tout détruit dans quelques heures… tout cela pour perdre mon foutre… Et voilà donc ce que c’est que le meurtre !… Un peu de matière désorganisée… quelques changemens dans les combinaisons, quelques mollécules rompues et replongées dans le creuset de la nature, qui les rendra dans quelques jours sous une autre forme à la terre : et où donc est le mal à cela ? Une femme, un enfant, sont-ils donc plus chers à la nature, que des mouches ou des vermisseaux ? Si j’ôte la vie à l’un, je la donne à l’autre : où est donc l’offense que je lui fais ! Cette petite révolte de mon esprit con-