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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/313

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Seigneur n’est plus pour nous un personnage sacré, et la sagesse rit aujourd’hui d’un petit individu comme toi, qui, parce qu’il a gardé dans ses archives quelques parchemins de ses pères, s’imagine être en droit de gouverner les hommes ; ton autorité, mon ami, ne consiste plus que dans l’opinion ; qu’elle change… elle en est bien près, et te voilà dans la classe des porte-faix de ton empire. Ne t’imagine pas qu’il faille grand’chose pour la faire varier ; à mesure que les hommes s’éclairent, ils apprécient ce qui les éblouissait autrefois : or, tes pareils et toi ne gagnent pas à l’opération. On commence à sentir qu’un roi n’est qu’un homme comme un autre (ce ne devrait être, tout au plus, que par sa prudence qu’il pourrait gouverner les autres) et qu’amolli par le luxe et le despotisme, il n’existe pas un seul souverain au monde qui ait les qualités nécessaires à un tel grade. La première vertu de celui qui veut commander aux hommes est de les connaître ; et comment les démêlera celui qui, perpétuellement aveuglé par leurs flatteries… et toujours trop éloigné d’eux, n’a jamais pu les apprécier ni les juger ? Ce n’est pas au sein du bonheur qu’on apprend à