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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 7, 1797.djvu/353

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nous devinâmes bientôt qu’elle était l’espèce de glaces qui nous étaient offertes ; dans cinq jattes de porcelaine blanche, étaient disposés douze ou quinze étrons de la plus belle forme et de la plus grande fraîcheur : voilà, nous dit l’ogre, les glaces dont j’use après dîner, rien ne facilite autant la digestion, et rien en même tems ne me fait autant de plaisir. Ces étrons viennent des plus beaux culs de mon sérail, et vous pouvez les manger en sûreté. Minski, répondis-je, il faut beaucoup d’habitude pour ce mets là ; peut-être pourrions-nous l’adopter dans un moment d’égarement ; mais de sang-froid, c’est impossible. À la bonne heure, dit l’ogre en s’emparant d’une jatte, et en en dévorant le contenu, faites comme vous voudrez, je ne vous contrains point. Tenez, voilà des liqueurs : pour moi, je n’en prendrai qu’après. Rien d’aussi lugubre que l’illumination de cette salle ; elle était bien digne du reste. Vingt-quatre têtes de morts renfermaient entr’elles une lampe dont les rayons sortaient par les yeux et par les mâchoires ; je n’ai jamais rien vu d’effrayant à ce point ; ici, l’ogre en bandant voulut s’approcher de moi ; je mis tant d’art à l’éviter