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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 9, 1797.djvu/204

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je crus n’avoir rien à déguiser avec lui, et dès le second jour, nous convînmes de nous défaire à l’amiable de ces deux tourtereaux, et que je resterais seul, le maître des richesses. Je prévins le patron du bâtiment ; quelques sequins me le gagnèrent. Faites ce que vous voudrez, me dit-il, mais méfiez-vous pourtant des yeux de cette femme que vous voyez là dans un coin ; elle croit vous connaître, et il est inutile, si cela est, de se faire observer par elle. Sois tranquille, répondis-je, nous prendrons bien notre moment ; puis jetant involontairement les yeux sur la créature que le patron disait être de ma connaissance, je demeurai convaincu qu’il se trompait, ne voyant dans ce triste individu, qu’une femme d’environ quarante ans, occupée à servir les matelots, et dont la langueur et la misère altéraient totalement les traits : je cessai donc d’y prendre garde, et revenant à notre projet, dès que les flots de la mer furent enveloppés des voiles de la nuit, Carle-Son et moi saisîmes mon camarade au fort de son sommeil, et le laissâmes doucement couler dans la mer. Philogone réveillée, frémit, mais en m’assurant néan-