Page:Sade - Les 120 Journées de Sodome, éd. Dühren, 1904.djvu/132

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tient, va t’en au diable, et surtout ne viens pas me chercher, car après ce que je te dis là, je te verrais tirer la langue d’un pied de long que je ne te donnerais pas un verre d’eau, quant à ma mère, bien loin d’être fâchée de son sort, tel qu’il puisse être, je te proteste, que je m’en réjouis et que le seul vœu, que je fais, est que la putain soit si loin que je ne la revoie de ma vie, je sais, combien elle m’a gênée dans mon métier, et tous les bons conseils, qu’elle me donnait, pendant que la garce en faisait trois fois pis, ma mie, que le diable l’emporte et surtout ne la ramène pas. Voilà tout ce que je lui souhaite.“ N’ayant pas (à vous dire le vrai) ni le cœur plus tendre, ni l’âme beaucoup mieux placée, que ma sœur, je partageai de bien bonne foi toutes les invectives, dont elle accabla cette excellente mère, et remerciant ma sœur de la connaissance qu’elle me procurait, je lui promis et de la suivre chez cette femme, et une fois qu’elle m’aurait adoptée, de cesser de lui être à charge, à l’égard du refus d’aller au couvent, je l’adoptai comme elle, „si effectivement elle est heureuse, tant mieux pour elle,“ dis-je, en ce cas nous pouvons l’être de même de notre côté, sans avoir besoin d’aller partager son sort, et si c’est un piège qu’on nous tend, il est très nécessaire de l’éviter. Sur cela ma sœur m’embrassa. — „Allons,“ dit-elle, „je vois à présent que tu es une bonne fille, vas, vas, sois sûr que nous ferons fortune, je suis jolie et toi aussi, nous gagnerons ce que nous voudrons, ma mie, mais il ne faut pas s’attacher, souviens-toi aujourd’hui l’un, demain l’autre, il faut être putain,80) mon enfant, putain dans l’âme et dans le cœur, pour moi,“ continua-t-elle, „je le suis, vois-tu, à présent, qu’il