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Page:Sade - Les 120 journées de Sodome (édition numérique).djvu/186

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l’évêque en fit autant à Giton, et Curval à Michette ; pour Durcet il le mit en bouche à Cupidon, en venant de le faire chier. On ne déchargea point, et la méridienne faite on fut écouter la Duclos.

« Un homme que nous n’avions pas encore vu, dit cette aimable fille, vint nous proposer une cérémonie assez singulière : il s’agissait de l’attacher sur le troisième échelon d’une échelle double ; à ce troisième échelon on attachait ses pieds, son corps où il portait, et ses mains élevées l’étaient au plus haut de l’échelle. Il était nu en cette situation ; il fallait le flageller à tour de bras, et avec le manche des verges quand les pointes étaient usées. Il était nu, il n’était nullement nécessaire de le toucher, il ne se touchait pas non plus lui-même ; mais, au bout d’une certaine dose, son instrument monstrueux prenait l’essor, on le voyait ballotter entre les échelons comme le battant d’une cloche et peu après, avec impétuosité, lancer son foutre au milieu de la chambre. On le détachait, il payait, et tout était dit.

« Il nous envoya le lendemain un de ses amis auquel il fallait picoter le vit et les couilles, les fesses et les cuisses, avec une aiguille d’or ; il ne déchargeait que quand il était en sang. Ce fut moi-même qui l’expédiai, et comme il me disait toujours d’aller plus fort, ce fut en lui enfonçant presque jusqu’à la tête l’aiguille dans le gland, que je vis jaillir son foutre dans ma main. En le lâchant, il se jeta sur ma bouche qu’il suça prodigieusement, et tout fut dit.

« Un troisième, toujours de la connaissance des deux premiers, m’ordonna de le flageller avec des chardons sur toutes les parties du corps indistinctement. Je le mis en sang ; il se regarda dans une glace, et ce ne fut qu’en se voyant en cet état qu’il lâcha son foutre, sans rien toucher, sans rien manier, sans rien exiger de moi.

« Ces excès-là me divertissaient fort, et j’avais une volupté secrète à les servir ; aussi, tous ceux qui s’y livraient étaient-ils enchantés de moi. Ce fut environ vers le temps de ces trois scènes-là qu’un seigneur danois, m’ayant été adressé pour des parties de plaisir différentes et qui ne sont pas de mon ressort, eut l’imprudence de venir chez moi avec dix mille francs de diamants, autant de bijoux, et cinq cents louis d’argent comptant. La capture était trop bonne pour la laisser échapper : entre Lucile et moi, le gentilhomme fut volé jusqu’à son dernier sol. Il voulut faire des plaintes, mais comme je soudoyais fortement la police, et que dans ce temps-là, avec de l’or, on en faisait ce qu’on voulait, le gentilhomme eut ordre de se taire et ses effets m’appartinrent, à quelques bijoux près qu’il me fallut céder aux exempts pour jouir tranquillement du reste. Il ne m’était jamais arrivé de faire un vol sans qu’un bonheur ne m’arrivât le lendemain : cette bonne fortune-ci fut une nouvelle pratique, mais une de ces pratiques journalières qu’on peut regarder comme la pièce de bœuf d’une maison.

« Celle-ci était un vieux courtisan qui, las des hommages qu’il recevait dans le palais des rois, aimait à venir changer de rôle chez des