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Page:Sainte-Beuve - Poésies 1863.djvu/408

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LES CONSOLATIONS.

Le jour de leurs vœux, sous les grille
S’en allaient aux yeux des parents ;
Et foulant leurs bouquets de fête,
Livrant les cheveux de leur tête,
Épanchaient leur âme à torrents.

Lui-même il dut payer sa dette.
Au temple il porta son agneau :
Dieu marquant sa fille cadette
La dota du mystique anneau.
Au pied de l’autel avancée
La douce et blanche fiancée
Attendait le divin Époux ;
Mais, sans voir la cérémonie,
Parmi l’encens et l’harmonie
Sanglotait le père à genoux.

Sanglots, soupirs, pleurs de tendresse,
Pareils à ceux qu’en sa ferveur
Magdeleine la pécheresse
Répandit aux pieds du Sauveur ;
Pareils aux flots de parfum rare
Qu’en pleurant la sœur de Lazare
De ses longs cheveux essuya ;
Pleurs abondants comme les vôtres,
Ô le plus tendre des Apôtres,
Avant le jour d’Alleluia !

Prière confuse et muette,
Effusion de saints désirs !
Quel luth se fera l’interprète
De ces sanglots, de ces soupirs ?
Qui démêlera le mystère
De çe cœur qui ne peut se taire