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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/289

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LIVRE TROISIÈME.

et de tout ce marais immense, de cette immersion universelle où nage, comme elle peut, la pauvre nature humaine naufragée, il arrive au bas de L’unique Colline ; il y prend pied, et la gravit en insistant ; il monte dans son discours, il monte avec une sorte d’effroi qui perce dans ses paroles, il monte sous le poids de toutes ces misères cette rude pente du Golgotha ; et, à mesure qu’il s’y élève, il fait voir de là comment tout s’y range, et l’ordonnance que cela prend ; tant qu’enfin, saisissant et serrant d’un violent amour le pied de la Croix qui règne au sommet, il crie le mot de salut, et force son interlocuteur étonné à reconnaître du moins de là, aux choses de notre univers, le seul aspect qui ne soit pas risible ou désolé.

« Cet homme est étrange pour un si grand esprit, » se dit Molière rêveur en s’en retournant.

J’ai presque à demander pardon de cette si grave préface que je donne pour le Tartufe, mais qui ne me paraît pas moins convenir en vérité au Tartufe qu’au Misanthrope.