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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/33

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LIVRE TROISIÈME.

M. de Saci, qui n’était excellent qu’à gouverner les âmes, une à une, moralement, tout à l’intérieur, et non pas à avoir une vue générale de gouvernement en pareille crise ;

M. Singlin, tout à l’heure débordé ; il est insuffisant ;

M. de Barcos, — absent, retiré dans son abbaye, et d’ailleurs confus et sans netteté, avec la plume malheureuse, et d’une autorité déjà compromise ; M. Le Maître, — pénitent puissant, toujours à genoux, toujours indompté, rugissant, n’ayant pas trop de toute la main serrée de M. de Saci pour le tenir, depuis qu’il a perdu son chef auguste en M. de Saint-Cyran ;

M. d’Andilly, — un beau nom par rapport au monde, de beaux cheveux blancs, une décoration du Désert plutôt qu’une colonne, non théologien, et sans autre autorité que pour le respect personnel qui lui est acquis.

Reste Arnauld, réputé chef au dehors, général qui n’est, à vrai dire, que le plus bouillant soldat. Je ne parle pas des secondaires ; je ne parle pas de l’illustre mère Angélique, la plus capable peut-être d’embrasser l’ensemble, si son humilité de servante du Seigneur lui avait seulement permis de songer un seul instant à ces questions.

Ainsi, en lui-même, Port-Royal, au moment où la Bulle arrivait, était une place de beaucoup plus formidable apparence que de résistance solide et que d’obéissance réelle sous un même chef fidèle à l’esprit. Tout à l’entour, au contraire, il y avait chez les ennemis un grand mouvement de coalition et d’union. Le cardinal Mazarin, à qui ces disputes religieuses étaient foncièrement indifférentes, et qui n’y voyait qu’un jeu d’où il pût tirer son épingle politique, avait intérêt,