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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/364

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PORT-ROYAL.

restriction que Pascal se sépara d’eux, et qu’il jugea qu’on faiblissait, ou plutôt qu’on reniait. Il avait, dans sa participation au premier Mandement, épuisé toute sa condescendance ; il avait atteint ses dernières limites, et il rentra dès lors, pour n’en plus sortir, dans la pleine et pure vérité. J’ai précédemment (chapitre VIII) indiqué l’esprit et la portée de ce désaccord ; le menu en serait insignifiant et fastidieux[1]. Il suffit de savoir qu’un jour,

    qu’étant soumises avec un profond respect à notre Saint-Père le Pape, et n’ayant rien d’aussi précieux que la Foi, nous embrassons sincèrement et de cœur tout ce que Sa Sainteté et le Pape Innonocent X en ont décidé, et rejetons toutes les erreurs qu’ils ont jugé y être contraires. »

  1. Une seule circonstance ne paraîtrait peut-être pas sans intérêt. Il y avait au monastère de Paris une Sœur Flavie, maîtresse des enfants. C’est elle, si l’on s’en souvient, qui avait appliqué le reliquaire à la tumeur lacrymale de la petite Marguerite, dans ce qu’on appelle le miracle de la Sainte-Épine. Fille d’esprit, elle était très-liée avec la Sœur Angélique de Saint-Jean et avec la Sœur de Sainte-Euphémie. Après la mort de celle-ci, elle conserva des relations amicales avec les deux demoiselles Périer, qui étaient ses élèves. Or, il arriva que, par suite de ces intimités et des confidences qu’elles amenèrent, la Sœur Flavie fut très-informée du désaccord où était Pascal avec ces Messieurs ; elle se procura même par mesdemoiselles Périer des copies des petits Écrits de leur oncle sur le Formulaire. Mais bientôt, ayant jugé plus prudent de se ranger dans l’obéissance, et se flattant, dit-on, de devenir abbesse, elle parla, et livra plus d’un utile secret aux Supérieurs imposés du dehors, à M. Chamillard particulièrement. Elle lui communiqua ces copies qu’elle avait conservées, et qui passèrent aux mains de l’Archevêque ; elle rapporta des paroles trop sincères et compromettantes de la Sœur Angélique de Saint-Jean. Ainsi la dissidence intérieure s’ébruita, et M. Chamillard en triompha dans ses Réponses et réfutations de 1665 : « Je me contente, disait-il, de ce que j’ai appris de plus particulier dans la conduite de cette affaire, et rapporte seulement le témoignage de ceux de leur parti qui ont été plus sincères que les autres, pour découvrir ce qu’ils tiennent caché depuis plusieurs années sous cette restriction qui abuse les simples… L’une des religieuses qui ont signé, qui avoit autrefois beaucoup de part au secret du parti, et qui présentement est soumise à l’Église, a eu deux Manuscrits : j’en ai vu un où l’auteur, qui ne pouvoit souffrir cet artifice, leur reproche que la restric-