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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/456

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PORT-ROYAL.

le plus abondamment pourvu. — C’est à cet article des Prophéties que Pascal, dans l’Entretien dont il est parlé, acheva de se surpasser lui-même, et que ceux qui l’écoutaient si attentivement furent comme transportés.

Et en effet, tout charnels que nous sommes devenus, en lisant ces fragments mystiques de Pascal on se rend compte de l’effet que durent produire, sur un auditoire d’avance convaincu, cette fécondité d’explications neuves, subtiles, ingénieuses ou grandes, toutes ces hardies paroles tant répétées depuis, mais éclatant pour la première fois :

« Quand la parole de Dieu, qui est véritable, est fausse littéralement, elle est vraie spirituellement…
Tout tourne en bien pour les Élus, jusqu’aux obscurités de l’Écriture… ; et tout tourne en mal pour les autres, jusqu’aux clartés….
Il est juste qu’un Dieu si pur ne se découvre qu’à ceux dont le cœur est purifié.
Un mot de David ou de Moïse comme celui-ci : Vous circoncirez les cœurs, fait juger de leur esprit, etc. … »

Pour nous encore, il y a, dans l’ordre des preuves et arguments de Pascal, quelques-uns de ces traits déterminants comme ceux qu’il voyait dans David et dans Moïse, de ces éclairs qui sortent du centre de la nue, et qui suppriment les intervalles obscurs. Ajoutons que ce ne sont, en effet, que des instants. L’éclair se brise, et l’obscurité recommence.

Dans ces vues de Pascal sur les Figures de l’ancienne Loi, je trouve nombre de pensées qui, pour la forme non moins que pour le fond, en rappellent d’analogues chez M. de Saint-Cyran, lequel, on s’en souvient, avait à un haut degré ce tour d’intelligence interprétative et ce mode d’expression concise. Pascal n’avait pas besoin de guide ; il n’y a guère à douter pourtant que certaines de ces pensées de Saint-Cyran n’aient souvent