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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/483

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LIVRE QUATRIÈME.

Il a été très-surpris de trouver faux tout ce que l’on avoit rapporté, et il a dit à ces Messieurs qu’ils avoient des ennemis qui en faisoient bien accroire. »

C’est de cette visite, ou d’une autre du même genre, qu’on lit dans un Mémoire du neveu[1] de M. de Beaupuis un petit récit comme nos amis aiment à en faire. Sur un ordre de la Cour qu’avaient provoqué les Jésuites, le Lieutenant-civil ou le Commissaire arrive au cul-de-sac Saint-Dominique, et demande le Supérieur ; il suit de si près le portier, qu’il entre en même temps que lui dans la chambre de celui qu’on allait avertir. Il trouve M. de Beaupuis assis près de sa table, et lisant ; il lui demande ce qu’il fait : « Vous le voyez, Monsieur, » lui dit le Supérieur. En même temps, le visiteur empressé porte la main sur le livre, qui était un Recueil de Sentences tirées de l’Écriture sainte, des Pères et autres pieux auteurs, et appropriées aux Saints de chaque jour. En l’ouvrant, il tombe sur la Sentence inscrite au jour de saint François d’Assise, 4 octobre, et qui était précisément tirée de M. de Saint Cyran : les premières éditions portaient en marge ou à côté le nom de Saint-Cyran, qu’on effaça dans les éditions suivantes. Au-dessous de la Sentence, on lisait de plus ces mots : Priez pour son Ordre. Tout préoccupé de cette idée, alors répandue dans le public, que les Jansénistes voulaient établir un nouvel Ordre, le Commissaire crut avoir mis la main sur le fait, et il demanda ce que c’était que cet Ordre, et s’il y avait donc un Ordre de Saint-Cyran : « Nullement, Monsieur, répondit le Supérieur : la sentence est tirée de M. de Saint-Cyran ; mais la prière est » pour l’Ordre de Saint François. »

On n’a pas la suite de ces tracasseries. Ce qui est cer-

  1. Le Supplément (in-4°) au Nécrologe donne ce Mémoire comme étant du frère de M. de Beaupuis, mais il est d’un neveu.