Aller au contenu

Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/560

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
550
PORT-ROYAL.

de bon chez tous, du philosophe allemand Clauberg comme de Ramus. Ce besoin d’équité, cette guerre à ses propres préventions, perce dans les moindres circonstances. Le Père Petau, en un endroit, est cité parmi les plus habiles gens de l’Église. À l’égard de Montaigne seul, on sort, en une page bien connue[1], des bornes de la modération ; pourtant il est cité en d’autres endroits honorablement, même à l’article des faux miracles, où l’on donne son discours comme ingénieux.

Les exemples nombreux sont pris à dessein de toutes sortes de sciences, et en particulier de la morale : on n’a pas craint d’en tirer parfois matière à digression. Écoutons la raison qu’en donne ce bon sens libre, à la barbe des pédants formalistes et des suppôts d’école, qui rangeaient avant tout chaque science suivant l’étiquette : « Quand on a jugé qu’une matière pouvoit être utile pour former le jugement, on a peu regardé à quelle science elle appartenoit. L’arrangement de nos diverses connoissances est libre comme celui des lettres d’une imprimerie ; chacun a droit d’en former différents ordres selon son besoin, quoique, lorsqu’on en forme, on les doive ranger de la manière la plus naturelle. » Ces exemples nombreux sont une partie variée de la Logique, et qui la fait lire avec un peu moins de chagrin, ce qu’on voulait obtenir. Ils tiennent en éveil l’intérêt et donnent une quantité d’ouvertures à l’esprit pour s’adresser ensuite à ces auteurs dont on a cité quelque opinion. Le choix de certains exemples atteste une noble et, disons


    exacts ne pouvoir se contenter des à-peu-près de Lancelot. Mais que vous dirai-je ? c’est la manière de Port-Royal, et je me plais à la faire ressortir en tout. L’utilité, à cette date de 1662, était de diminuer Aristote, l’Aristote des Écoles, qui avait ses idolâtres ; et Port-Royal l’a fait, sans soupçonner peut-être assez l’incomparable type de l’Aristote véritable.

  1. Voir précédemment tome II, page 402.