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Page:Sainte-Beuve - Portraits contemporains, t1, 1869.djvu/392

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VICTOR HUGO.

EN 1831[1].

Ce siècle avait deux ans ! Rome remplaçait Sparte,
Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte,
Et du premier Consul, trop gêné par le droit,
Le front de l’Empereur brisait le masque étroit.
Alors dans Besançon, vieille ville espagnole,
Jeté comme la graine au gré de l’air qui vole,
Naquit d’un sang breton et lorrain à la fois
Un enfant sans couleur, sans regard et sans voix ;
Si débile, qu’il fut, ainsi qu’une chimère,
Abandonné de tous, excepté de sa mère,
Et que son cou ployé comme un frêle roseau
Fit faire en même temps sa bière et son berceau.
Cet enfant que la vie effaçait de son livre,
Et qui n’avait pas même un lendemain à vivre,

  1. L’espèce de biographie qui suit ne saurait avoir qu’une valeur approximative. On a publié depuis sur Victor Hugo, raconté par un témoin de sa vie, deux volumes qui ne sont point eux-mêmes définitifs. Je n’avais point écrit mon article, qui était destiné primitivement à une Biographie des Contemporains, sans m’informer et sans puiser à la meilleure source ; mais il ne m’avait point été donné de contrôler ces premières informations. Qu’on veuille donc ne voir dans ces esquisses anticipées, mais pourtant fidèles et vraies à bien des égards, que des morceaux provisoires, utiles à leur moment, des essais qui ouvraient la voie et qui étaient faits pour être dépassés.