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Page:Sainte-Beuve - Portraits littéraires, t1, nouv. éd.djvu/348

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après. M. Ballanche, par un épithalame en prose, célébra, dans le mode antique, la félicité de son ami et les chastes rayons de l’étoile nuptiale du soir se levant sur les montagnes de Polémieux. Pour le nouvel époux, les deux premières années se passèrent dans le même bonheur, dans les mêmes études. Il continuait ses leçons de mathématiques à Lyon, et y demeurait avec sa femme, qui d’ailleurs était souvent à Saint-Germain. Elle lui donna un fils, celui qui honore aujourd’hui et confirme son nom. Mais bientôt la santé de la mère déclina, et quand M. Ampère fut nommé, en décembre 1801, professeur de physique et de chimie à l’École centrale de l’Ain, il dut aller s’établir seul à Bourg, laissant à Lyon sa femme souffrante avec son enfant. Les correspondances surabondantes que nous avons sous les yeux, et qui comprennent les deux années qui suivirent, jusqu’à la mort de sa femme, représentent pour nous, avec un intérêt aussi intime et dans une révélation aussi naïve, le journal qui précéda le mariage et qui ne reprend qu’aux approches de la mort. Toute la série de ses travaux, de ses projets, de ses sentiments, s’y fait suivre sans interruption. A peine arrivé à Bourg, il mit en état le cabinet de physique, le laboratoire de chimie, et commença du mieux qu’il put, avec des instruments incomplets, ses expériences. La chimie lui plaisait surtout : elle était, de toutes les parties de la physique, celle qui l’invitait le plus naturellement, comme plus voisine des causes. Il s’en exprime avec charme : « Ma chimie, écrit-il, a commencé aujourd’hui : de superbes expériences ont inspiré une espèce d’enthousiasme. De douze auditeurs, il en est resté quatre après la leçon, je leur ai assigné des emplois, etc. » Parmi les professeurs de Bourg, un seul fut bientôt particulièrement lié avec lui ; M. Clerc, professeur de mathématiques, qui s’était mis tard à cette science, et qui n’avait qu’entamé les parties transcendantes, mais homme de candeur et de mérite, devint le collaborateur de M. Ampère dans un ouvrage qui devait avoir pour titre : Leçons élémentaires sur les séries et autres