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Page:Samain - Œuvres, t2, 1921.djvu/66

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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN


 
La fenêtre s’entr’ouvre un peu ;
Et la femme, poignant aveu,
Tord ses beaux bras nus dans l’air bleu…

Ô secrètes ardeurs des nuits provinciales !
Cœurs qui brûlent ! Cheveux en désordre épandus !
Beaux seins lourds de désirs, pétris par des mains pâles !
Grands appels suppliants, et jamais entendus !

Je vous évoque, ô vous, amantes ignorées,
Dont la chair se consume ainsi qu’un vain flambeau,
Et qui sur vos beaux corps pleurez, désespérées,
Et, faites pour l’amour et d’amour dévorées,
Vous coucherez, un soir, vierges dans le tombeau !

Et mon âme pensive, à l’angle de la place,
Fixe toujours là-bas la vitre où l’ombre passe.

Le rideau frêle au vent frissonne…
La lampe meurt… Une heure sonne.
Personne, personne, personne.