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Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/111

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La terrasse était dans le même état d’abandon qu’autrefois. Les grandes herbes n’étaient pas foulées. Diane vit qu’on ne se promenait jamais par là ; elle sut plus tard que Blanche, qui craignait beaucoup les serpents et qui traitait de vipères les plus innocentes couleuvres, n’allait jamais dans les ruines et ne permettait à personne d’y aller. Pourtant elle habitait au milieu de ces décombres, et Diane s’étonnait, en même temps qu’elle s’en réjouissait, de voir que cette solitude et ce désordre qui l’avaient autrefois charmée, n’avaient subi aucune amélioration bourgeoise, c’est-à-dire aucune altération.

Elle admira ce pêle-mêle d’arbres touffus et d’arbres morts, de magnifiques plantes sauvages et de plantes autrefois cultivées, aussi libres, aussi folles les unes que les autres ; ce chaos de pierres où la mousse avait envahi la roche naturelle et la roche taillée. Elle revit le filet d’eau pure qui avait alimenté jadis les bassins et les cascatelles, et qui frissonnait discrètement entre l’herbe et les cailloux. Elle contempla cette élégante façade renaissance, où le lierre vivace s’enlaçait aux guirlandes de lierre fouillées dans la pierre. Quelques fenêtres finement ouvragées, quelques clochetons avaient peut-être disparu. Diane ne se souvenait pas bien exactement de ces détails ; l’ensemble avait encore cet aspect riant et noble que conservent, même dans leur décrépitude, les édifices de cette brillante époque.