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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 4.djvu/314

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


DVII

À M. CHARLES DUVERNET, À NEVERS


Nohant, 24 février 1862.


Cher enfant,

Tu sais quelle douleur nous a frappés. Tu connaissais peu cet enfant ; mais tu as dû souvent nous entendre dire que c’était un cœur d’or. Sous le rapport de la tendresse, de l’expansion, de la franchise, il était vraiment exceptionnel, et, quand il nous a quittés, à Tamaris, nous pleurions tous sans savoir pourquoi. Nous nous demandions pourquoi nous l’aimions tant et avec un excès de sensibilité puérile.

Ce n’était pas une intelligence extraordinaire ; du moins il ne se faisait remarquer encore que par une facilité extraordinaire, et, comme il avait une vitalité impétueuse et peu d’application à l’étude, on ne savait s’il deviendrait ou non un homme distingué. Il était cœur des pieds à la tête, on peut dire ; si aimant et si aimable, qu’on ne songeait pas à lui demander d’être autrement qu’il n’était. Il a eu une mort atroce, et c’est une amertume de plus dans nos regrets ; mort atroce de souffrance, admirable de courage. Nous avons été brisés, ses pauvres parents, Ferri, le prince ; c’est une consternation.