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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 4.djvu/87

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

accepterait-il un petit ? Enfin a-t-il vraiment de la composition et de l’originalité ?

Vous me faites compliment de Favilla ; moi, je ne vous ai pas vu depuis le Demi-Monde ; vous n’étiez pas à Paris, je crois, quand j’ai vu la pièce. C’est un chef-d’œuvre d’habileté, d’esprit et d’observation. C’est bien un progrès comme science du théâtre et de la vie, et pourtant j’aimais mieux Diane et Marguerite, parce que j’aime les pièces où je pleure. J’aime le drame plus que la comédie, et, comme une bonne femme, je veux me passionner pour un des personnages. Je regrettais que la jeune fille du Demi-Monde fût si peu développée après avoir été si bien posée, et que cette scélérate, si vraie d’ailleurs et si bien jouée, fût le personnage absorbant de la pièce. Je sais bien qu’après avoir fait la Dame aux Camélias intéressante, vous deviez faire le revers de la médaille. L’art veut ces études impartiales et ces contrastes qui sont dans la vie. Aussi ce n’est pas une critique que je fais. Je vous tiens toujours pour le premier des auteurs dramatiques dans le genre nouveau, dans la manière d’aujourd’hui, comme votre père est le premier dans le genre d’hier. Moi, je suis du genre d’avant-hier ou d’après-demain, je ne sais pas et peu importe. Je m’amuse à ce que je fais ; mais je m’amuse encore mieux à ce que vous faites, et vos pièces sont pour moi des événements de cœur et d’esprit. Me ferez-vous pleurer la prochaine fois ? Si vous êtes dans cette veine-là, je vous promets de ne