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Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/59

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— Qu’y a-t-il, monsieur Chantebel ? dit madame de Nives, qui m’observait. J’avais mis instinctivement ma main sur mon front pour rassembler mes idées. Êtes-vous fatigué de m’entendre ?

— Non, madame ; j’essayais de me souvenir. Eh bien ! je ne me rappelle pas que mademoiselle Ormonde, ma nièce, m’ait jamais parlé de mademoiselle de Nives.

— Alors je continue.

— Continuez, j’écoute.

— Quand Marie vit que je pleurais sincèrement sa mère, elle parut en revenir sur mon compte et m’embrassa en sanglotant, en me remerciant d’avoir soigné si fidèlement la moribonde. Je la crus revenue à de meilleurs sentiments ; elle me trompait. En entendant son père me supplier de rester, elle redevint aigre et outrageante. Je résolus alors de m’en aller, et je le lui annonçai ; mais son père avait dit qu’elle irait au couvent, et elle se mit presque à mes pieds pour me retenir. Deux jours plus tard, elle me résistait et m’injuriait encore. Son effroi du couvent ne pouvait vaincre sa haine et sa méchanceté.

— Mauvais caractère, aversion peut-être provoquée par la vôtre, impétuosité naturelle, déraison de l’enfance, inconséquence dans la passion, soit, je vous accorde tout cela ; mais d’aliénation mentale je n’en vois pas encore de preuve.