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Page:Sandre - Le purgatoire, 1924.djvu/198

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le purgatoire

se rangeant derrière les autorités du camp accourues à la nouvelle de la catastrophe. On avait prévenu le vieil oberst. Les cuisiniers étaient sur le seuil de la cuisine. Les Boches cachaient mal leur fureur. Nous jubilions. Soudain, le feldwebel nomma :

Monzieur le lieutenant Grampel !

Nul ne se présenta.

Monzieur le lieutenant Grampel ! répéta le feldwebel.

Aussi vainement que la première fois.

— Il est absent ? demanda le leùtnant de service.

— En permission, lança une voix.

Le coupable était trouvé. Le lieutenant Grampel, chasseur à pied de la division Driant, las déjà après quelques jours de captivité, avait pris la clef des champs. La cage était de fer et le gardien attentif, mais l’oiseau s’était envolé.

Sur ces entrefaites, Freiherr von Seckendorff, « commandeur de ce camp », arriva, suivi de son officier d’ordonnance qui s’intitulait lui-même, avec un inimitable accent qui transformait la phrase en une injure candide, « aide de ce camp ». Il s’annonça de loin. Gesticulant et vociférant, il gourmandait une sentinelle, Dieu sait pourquoi, comme si elle eût sa part de responsabilité dans la catastrophe. Le vieil oberst était démonté. Sa voix tremblait de rage mal contenue.

— Depuis quand est-il absent ? nous cria-t-il.

Il s’imaginait peut-être que nous trahirions notre heureux camarade.

— Depuis quand ?

Il insistait en brandissant sa canne.