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Page:Sandre - Le purgatoire, 1924.djvu/57

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de rouvrois à pierrepont

serie, on voulait essayer de faire parler le plus ancien d’entre nous en lui donnant le change. Le capitaine ne s’y trompa point, et, quand il revint parmi nous, il nous rapportait des choses précieuses, alors que son interlocuteur s’en allait les mains vides.

L’impression retirée par nous de cet entretien d’allure familière confirme celle que nous avons eue déjà en quittant le gourbi des Chambrettes : les Allemands sont inquiets au sujet de Verdun. Ils trouvent que le succès ne répond pas à leur attente. Ils voudraient savoir si nous avons des réserves d’infanterie et d’artillerie en arrière de notre ligne, qui semble précaire, mais qui peut-être cache un piège. Ils ne se fient pas aux déclarations que leur ont faites quelques soldats français qu’ils ont capturés, car ils ont plus d’une fois éprouvé que ces déclarations, fausses à plaisir, ne servaient qu’à les égarer. Comment obtenir qu’un officier parle ? C’est bien difficile, et il faut emprunter des chemins détournés.

L’interprète croit que Verdun tombera, comme tous les Allemands le croient. Il estime néanmoins que ce ne sera ni sans retard, ni sans pertes pour les assaillants. Mais il est d’une intelligence peut-être plus grande, à moins que les idées propagées par le gouvernement de Berlin ne soient dosées suivant les classes qu’on veut toucher, et, tandis que tous les troupiers allemands nous ont chaudement affirmé que la prise de Verdun terminerait les hostilités, il professe quant à lui qu’elle ne servirait de rien dans la marche de la guerre. Verdun n’est point Paris. Quelle carte ce serait pourtant entre les mains de l’Allemagne !