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Page:Sauvage - Tandis que la terre tourne, 1910.djvu/27

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pleine lune ou croissant


Lune, ton nom est doux comme la mer dormeuse,
Comme une motte de nuage à l’horizon,
Comme un calice ouvrant sa gloire paresseuse,
Comme une essence d’huile aux fleurs de la saison.
Tu montes dans le ciel comme un vol sans secousse,
Comme le glissement d’un cygne sur l’étang,
Comme ce duvet rond que l’air mobile pousse,
Lune, tête naïve et rose du printemps,
Tête de clown du rouge et des poudres fardée,
Tête de ménagère aux luisantes moiteurs
Dont la bajoue étend sa largeur potelée,
Tête de vierge jaune et couverte de pleurs,
Tête de chérubin avec de courtes ailes,
Tête de sphinx, narquoise au bord de l’infini,
Pleine du haut savoir des choses éternelles,
Et crâne ballottant son univers fini.
Lune, gorge polie et lourde de l’espace
D’où coule un lait d’argent sur le monde enfantin,
Baume d’apaisement sur l’humanité lasse,
Toi qui te vêts de blanc pour l’aube du matin,