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Page:Sauvage - Tandis que la terre tourne, 1910.djvu/98

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tandis que la terre tourne

Et dans ma gorge en feu le flot des larmes sèches.
J’ai pourtant comme toi déroulé mon matin ;
Je connais que ma force est égale à la tienne,
Que mon amour d’aurore embrasse l’horizon
Et que du plus lointain passé qu’il me souvienne
J’ai parcouru la sphère où tournent tes saisons.
Mais parce que je suis sur un chemin de glèbe
Et que tu vas ramant ta barque sur l’azur,
Je dois manger le pain besogneux de la plèbe
Et sentir que le front sur l’esprit est un mur.
Alors, je me retourne et regarde Pégase,
Ce bon cheval humain que je baise sur l’œil,
Et je lui dis : Pourquoi le matin tant d’emphase,
Pourquoi le vol hautain, la pensée et l’orgueil ?
Comme Titania près de sa tête d’âne,
Ne dois-je pas plutôt t’enguirlander de fleurs,
Tandis que le criquet que la chaleur basane
Craquètera dans l’herbe où brûlent des odeurs ;
Tandis que dégageant son urne de la tige,
La campanule mauve et débordante d’eau
Dans le vent bercera son délicat vertige ;
Tandis que le berger qui longe le coteau,