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Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/166

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s’ennuyait dans l’île. Elle redoutait qu’il ne se décidât à partir. Alors, tout en dételant sa bête, elle se détourna encore pour donner à l’homme étranger le réconfort de sa beauté qu’illuminait un clair regard.

Mais sans même lui répondre par un signe, il pensa :

— Comme elle est loin de soupçonner le chagrin immense que j’éprouverais si j’avais du cœur...

La veille au soir, il avait reçu de Marseille une lettre longtemps attardée aux bureaux de Brest et du Conquet ; une lettre dans laquelle une femme teinte et couverte de fards, avec une vilaine âme misérable et tourmentée, lui criait sa détresse morale et le conjurait de reprendre la vie commune. — Et il s’était promis de résister.

Une femme neurasthénique et faible, incohérente, et qu’on lui avait jetée dans les bras. Un être inquiet et artificiel dont l’inconduite avait ruiné le bonheur, et qu’un jour de dégoût tragique, il avait laissée entre les mains d’une mère détraquée et en butte aux pires influences de l’entourage de rastaquouères auquel la condamnait sa vie oisive et déréglée, elle qui portait son nom.