Aller au contenu

Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/290

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lots, à se créer des distractions avec des riens.

Il tenait dans un coffre quelques tubes de peinture a l’huile, et, quand il en avait assez de jouer avec son fils, il couvrait tout ce qui lui tombait sous la main, des morceaux de vitres, un pan de mur, un vieux meuble, les portes, n’importe quoi, de larges étendues de couleur bleue où l’on voyait encore la mer avec des lames scrupuleusement égales, en bon ordre, comme les équipages de la flotte quand ils défilent sur le cours d’Ajot. Sur cette eau, à peine différente du ciel, il peignait un trois-mâts ou un quatre, un cinq, un six-mâts, toutes voiles dehors, d’une fidélité absolue, exact jusqu’au moindre détail, jusqu’au moindre filin, déployant sur l’horizon perlé d’oiseaux marins, le loyalisme d’un pavillon tricolore, raide et solennel, comme s’il avait été découpé dans une boîte à sardines. Ou bien, il faisait des modèles de bateaux, logeait une corvette ou un canot de sauvetage dans une bouteille. La maison était encombrée de ces ouvrages de patience naïve. Il travaillait en sifflant un air, toujours le même.


Dans ce dernier séjour, Salomé, plus violente, avait soulevé des disputes dès son arri-