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Page:Say - Œuvres diverses.djvu/22

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de le combattre à quelques égards, sur l’analyse, beaucoup trop subtile, suivant lui, auquel il avait recours à l’occasion du revenu foncier (the rent).

L’apparition des Nouveaux principes d’Économie politique de Malthus devint l’occasion d’une polémique qui fut livrée à l’impression. Six Lettres à Malthus contiennent d’excellentes dissertations sur les causes des crises commerciales, sur la théorie des débouchés, sur celles des produits immatériels. La contradiction qu’il rencontrait sur ce dernier point conduisit J.-B. Say a suivre cette découverte jusque dans ses dernières conséquences. C’est ainsi qu’il arrivait par une logique serrée à établir que des services consommés en même temps que produits ayant une valeur réelle, non-seulement on devait reconnaître l’existence des produits immatériels, mais encore admettre que la valeur était toujours de sa nature immatérielle ; que les hommes, eu troquant les choses les unes contre les autres, ne tenaient nul compte, dans la fixation des prix, de la nature des molécules dont (lies se composaient, et s’occupaient seulement du travail qui y avait été incorporé, échangeant toujours au fond des services contre des services. Doctrine un peu abstraite, sans doute, mais féconde dans ses applications, et sans laquelle on essaierait en vain de résoudre les problèmes compliqués que présente la production des richesses.

Les réponses à Malthus servaient en beaucoup de cas aussi de réfutation à quelques-unes des plaintes de Sismondi sur les inconvénients de la liberté du travail et de la concurrence. Un article spécial sur la Balance des productions et des consommations[1] vint compléter la défense des principes, sans altérer en rien les excellents rapports qui unissaient deux hommes également amis du bien et de la vérité.

On s’étonnait avec raison qu’une science aussi importante pour l’humanité, aussi utile à consulter pour la bonne gestion des intérêts nationaux, fût encore laissée en dehors de tout enseignement public en France. On devait donc chercher d’abord à obtenir la création d’une chaire d’Économie politique dans l’une des écoles supérieures, et ensuite, à l’occasion de l’institution d’un enseignement professionnel au Conservatoire des Arts et Métiers, on chargea J.-B. Say de développer dans une lettre à M. Thénard, l’utilité de l’enseignement économique pour tous ceux qui se destinent à l’industrie. La chaire de l’École de Droit fut décidée en principe sans qu’on donnât suite à cette fondation, et la chaire du Conservatoire elle-même ne fut ouverte qu’avec une modification dans le titre du Cours. Le mot de politique effrayait trop un pouvoir ombrageux, ou dut se borner à enseigner l’économie industrielle. Ces restrictions, le lieu choisi pour l’enseignement, étaient au cours une grande partie de sa portée, et ce n’est qu’après 1830, lorsqu’il était déjà

  1. Page 250 de ce volume.