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LE BOUDDHISME AU TIBET

damne aux mauvaises conditions de l’existence. L’appréciation des actes, c’est à-dire la détermination du moment où l’existence doit cesser et de la classe où l’homme doit renaître, est l’affaire particulière de Shindje, « le seigneur des morts », qu’on appelle aussi Choigyal (sanscrit Dharmaraja), « le roi de la loi ». Shindje possède un miroir merveilleux qui lui montre toutes les bonnes et mauvaises actions des hommes ; avec une balance, il pèse le bien et le mal et, s’il trouve que l’existence présente d’un individu doit cesser, il ordonne à l’un de ses serviteurs qu’on appelle aussi Shindjes, de saisir l’âme et de l’apporter devant lui, afin de décider de son avenir. Il arrive assez souvent que le messager apporte une autre âme par erreur, ou parfois à dessein, quand il a été gagné par des offrandes. Le seigneur de la mort, après avoir constaté par son miroir que l’âme amenée devant lui n’est pas la bonne, la renvoie et menace son serviteur d’une punition sévère s’il est prouvé qu’il s’est volontairement trompé. En même temps il ordonne à un autre de lui amener l’âme désignée qui, en attendant la découverte de l’erreur, est restée tranquille dans son corps. On voit par là que l’on peut prolonger sa vie en se rendant favorable le serviteur du seigneur et de la mort[1].

MOYENS DE SE DÉLIVRER DE LA RENAISSANCE

Les péchés doivent s’expier par la renaissance. Les peines que l’âme souffre pendant qu’elle est soumise à la migration sont considérées comme si terribles, que la religion bouddhiste offre à ses dévots le moyen d’effacer pendant leur existence une partie des fautes qu’ils ont commises. L’affranchissement peut s’obtenir en réprimant les mauvais désirs, par la pratique assidue des vertus, des Dharânis et des Tantras et par la confession. Déjà dans l’histoire primitive du bouddhisme nous voyons que la confession des péchés est ordonnée. Ainsi les novices devaient accomplir cette cérémonie avant d’être admis dans la congrégation des fidèles : le caractère dominant du culte

  1. Shindje correspond au dieu Yama des Hindous ; à son sujet, comparez Coleman, Mythology of the Hindous, p. 112. Les Mongols l’appellent Erlik khan ou Yamantâka, Pallas, Mongol. Völker, vol. II, p. 553. On a dit à Pallas que les bonnes et les mauvaises actions étaient rapportées par deux esprits, l’un favorable, l’autre méchant. Ceux-ci, par l’ordre de Shindje, apportent l’âme devant lui et marquent le nombre de ses bonnes ou mauvaises actions par des cailloux blancs ou noirs, Shindje les contrôle au moyen du livre Bealtan Tooli, où sont enregistrés tous les actes de chaque individu.