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Page:Schoebel - Inde française, l’histoire des origines et du développement des castes de l’Inde.djvu/59

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le chef et le précepteur des castes (varmânâm). De ses bras, sortit le kshattra (la protection et) le kshattriya voué à ce devoir, (et) qui, formé de Purusha, protège les castes (varnân) contre les injures des méchants. Les arts qui donnent au monde la subsistance sortirent des cuisses du Seigneur, et voilà produit le vaiçya qui pourvoit à la conservation des hommes. Des pieds du Seigneur naquit l’obéissance pour l’accomplissement du devoir, d’où provint anciennement le çûdra, dont l’état plaît à Hari. Ces castes honorent par leur devoir Hari leur précepteur. C’est pour se purifier par la loi qu’elles ont été produites avec leurs fonctions[1]. »

Si maintenant du Bhâgavata, le purâna le plus vénéré, nous passons au Vishnu qu’on estime le plus ancien, nous y lisons sur l’origine des castes le morceau particulièrement mystique que voici. « Maitreya dit : Vous m’avez raconté, ô brâhmane, l’arvâksrota qui est la création humaine ; dites-moi avec détail comment Brahmâ l’a formée ; comment surtout il a fait les castes et avec quelles qualités, etc. Parâçara dit : Lorsque Brahmâ, méditant la vérité, éprouva le désir de créer le monde, les créatures douées au premier chef de bonté sortirent de sa bouche puis, d’autres, douées au premier chef de passion, sortirent de sa poitrine ; celles qui étaient douées à la fois de passion et d’obscurité sortirent de ses jambes. Brahmâ forma de ses pieds les créatures en lesquelles prédominait l’obscurité, et voilà alors le système des quatre castes, câtur varnyam : les brâhmanes, les kshatriyas, les vaiçyas et les çûdras, issus des pieds, des cuisses, de la poitrine et de la bouche »[2].

Le narrateur ajoute, que le but du système des quatre castes était, dans la pensée de Brahmâ, de créer le meilleur instrument pour l’accomplissement du sacrifice : yajnanish pattaye sarvam etad brahmâ cakara vai, câtur varnyan yajnasâdhanam uttamam (st. 6), et un peu plus loin, il affirme le principe religieux de l’institution en disant, qu’elle est entièrement disposée pour la pratique de la foi : samyak çraddhâsamâçârapravanâ (st. 10).

C’est toujours d’une manière identique au fond que le système est expliqué dans d’autres purânas. Le Vâyu, par exemple, après avoir dit que Brahmâ, pris du désir de créer, forma d’abord mille couples pieux (mithunânânsahasran satvodriktâh) de sa bouche ; puis, mille autres pleins de passion (rajasodriktâh) de sa poitrine ; puis, autant remplis de passion et d’obscurité (rajastamobhyamudriktâ) de ses cuisses ; enfin, le dernier mille, voué à l’obscurité (udriktâs tamasâ) de ses pieds, affirme que dans le kritayuga, l’âge de la vérité (sattvan kritan), il n’y aura ni

  1. Mukbató vartata brahma purushasya kutûdvaha, yastûnmukhatvâd varnânâm naukhyô bhûd brâhmano guruh, bahubhyô’ vartata kshattran khattriyas tad anuvratab, yo jatas trâyate varnân paurushah kantakakshatât, etc. (Bhag-Pur. III, 6, 30-31.)
  2. Mailreya uvâca : arvâk srotas tu kathito yas tu mânushah, brahman vistarato brûh i brahmâ tam asrijed yathâ ; yathâ ca varnân asrijed vad gunâç, etc. (Vishnnu Purâna I, 6, 1-5.)