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Page:Schopenhauer - Éthique, Droit et Politique, 1909, trad. Dietrich.djvu/111

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fils, — ou de l’État, comme dans l’Inde. La conséquence, c’est qu’elles ne devraient jamais pouvoir disposer, de leur libre autorité, d’une fortune qui ne leur appartient pas en propre. Qu’une mère puisse devenir tutrice et administratrice de la part héréditaire paternelle de ses enfants, ceci m’apparaît comme un non sens impardonnable et une abomination. Dans la grande majorité des cas, cette femme mangera avec son amant — qu’elle l’épouse ou non — ce que le père a, par le travail de toute sa vie, épargné pour ses enfants, et aussi pour elle. Père Homère nous donne déjà cet avertissement :

Οισθα γαρ οιος θυμος ενι στηθεσσι γυναικος,
Κεινου βουλεται οικον οφιλλειν, ος κεν οπυιη.
παιδων δε προτερων και κουριδιοιο φιλοιο,
Ουκετι μεμνηται τεθνηοτος, ουδε μεταλλα
.[1]
______________(Odyssée, chant XV, vers 20-23.)

La mère devient souvent, après la mort du mari, une belle-mère. Or, ce sont les belles-mères seules qui jouissent du si mauvais renom qui a donné naissance au terme de « marâtre ». Ce renom, elles le possédaient déjà au temps d’Hérodote[2] (Histoires, livre IV, § 154), et

  1. « Tu sais quelle âme renferme le sein d’une femme. Elle aspire toujours à augmenter les domaines de celui dont elle devient l’épouse. Le souvenir de ses premiers enfants, du mari défunt, s’efface, et jamais elle ne s’informe de ceux qui lui ont été si chers. »
  2. Il s’agit de la seconde femme d’Eléarque, roi d’Axos, qui, « aussitôt dans la maison, fut pour Phronime (fille du premier mariage) une marâtre, la maltraitant et toujours machinant quelque chose contre elle : finalement, elle l’accusa d’impudicité, et se fit croire de son mari ». Celui-ci obtint par serment d’un marchand, son hôte, la promesse qu’il jetterait la jeune fille à la mer ; mais le marchand, pour satisfaire au serment que le roi lui