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Page:Schopenhauer - Mémoires sur les sciences occultes.djvu/199

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MÉMOIRES SUR LES SCIENCES OCCULTES

lumière, de couleur, d’odeur, de goût, mais sans l’action des causes extérieures qui les provoquent d’ordinaire, simplement par l’effet d’une incitation intérieure, par suite d’une action qui se produit en sens inverse et dans un ordre renversé des temps. Par là s’explique cette corporalité des rêves, par laquelle ils se distinguent si puissamment des simples imaginations. Le produit de l’imagination (à l’état de veille) est toujours simplement dans le cerveau : ce n’est, en effet, que la réminiscence, mettons modifiée, d’une excitation ancienne, matérielle, occasionnée par les sens, de l’activité cérébrale intuitive. La vue de rêve, au contraire, n’est pas simplement dans le cerveau, mais même dans les nerfs sensitifs, et elle est sortie d’une excitation matérielle des nerfs sensitifs bien réelle, venant de l’intérieur et gagnant le cerveau. Parce que donc il est bien réel que nous voyons dans le rêve, Apulée a eu bien et profondément raison de faire dire à Charite, laquelle est au moment d’arracher les deux yeux à Thrasylle plongé dans le sommeil : Vivo tibi morientur oculi ; nec quidquam videbis nisi dormiens (Metam. VIII, p. 172, éd. Bib.). L’organe du rêve est donc le même que l’organe de la conscience à l’état de