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Page:Schröder-Devrient - L’Œuvre des Conteurs Allemands - Mémoires d’une chanteuse Allemande, 1913.djvu/82

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MÉMOIRES D’UNE CHANTEUSE ALLEMANDE


aimable et bien élevé. Elle vit immédiatement qu’elle lui plaisait. Il s’approchait d’elle avec l’émotion et la gaucherie d’un adolescent se sentant attiré pour la première fois par une femme ; il ne pouvait résister à l’obscur commandement de sa nature. Marguerite avait beaucoup de peine à cacher son indiscrète passion. Elle aurait volontiers satisfait ce dernier désir qu’il ignorait encore, mais elle ne savait comment lui expliquer qu’elle exigeait des garanties. Charles avait été élevé à la campagne ; il ignorait tout de ces choses ; ses paroles et ses actions étaient simples et honnêtes. Marguerite connut enfin l’amour, et elle se débattait vivement contre sa toute-puissance. Elle croyait tout connaître et être maîtresse de son cœur ! Tous ses principes s’évaporèrent au feu du premier baiser ! Elle était sans défense devant les caresses hésitantes de son bien-aimé ! Il était si gauche qu’elle devait le conduire sans en avoir l’air. Mais la nature fouette même le plus naïf, le plus vertueux, et quand on s’est engagé dans cette dangereuse voie, il faut aller jusqu’au bout. Marguerite s’amusait beaucoup de voir les louables efforts qu’il faisait pour arriver à des fins qu’il ne soupçonnait même pas. Elle se sentait si supérieure à lui ! Elle se croyait assez maîtresse d’elle-même pour garder tout son sang-froid au moment fatal, car son jeune amoureux se pâmait déjà au moindre frôlement extérieur. Elle pensait pouvoir empêcher un baiser dangereux. Mais elle ne savait pas que chez elle aussi chaque fibre, chaque nerf attendait l’union intime. Elle ne connaissait pas la