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IVANHOÉ.

pour lequel je ne sois ton homme ; mais, si c’est à moi de choisir, que dis-tu, bon ami, de ces joujoux ?

Ce disant, il ouvrit une seconde armoire, et en tira une couple de coutelas et de boucliers comme on s’en servait à cette époque parmi les yeomen. Le chevalier, qui suivait avec attention les mouvements de l’ermite, remarqua que cette cachette était garnie de deux ou trois bons arcs et d’une arbalète, d’un paquet de viretons à l’usage de cette dernière arme, et d’une demi-douzaine de paquets de flèches ; une harpe et quelques autres objets d’une apparence peu canonique se dessinaient dans la pénombre de l’obscur réduit au moment où il fut ouvert.

— Je te promets, frère clerc, dit le chevalier, que je ne te ferai plus de questions indiscrètes, le contenu de cette armoire me fournissant réponse à toutes mes demandes ; mais je vois là une arme (ici il allongea la main et tira la harpe à lui) sur laquelle j’aimerais infiniment mieux lutter d’adresse avec toi qu’avec l’épée et le bouclier.

— J’espère, messire chevalier, dit l’ermite, que ce n’est point à juste titre que l’on t’a surnommé le Fainéant ; je te déclare que je ne sais qu’en penser ; néanmoins, tu es mon hôte, et je ne veux pas mettre ton courage à l’épreuve, du moment où cela n’est point de ton plein gré. Assieds-toi donc et remplis ta coupe ; buvons, chantons et soyons joyeux. Si tu connais une bonne chanson, tu seras le bienvenu pour un pâté de venaison à Copmanhurst aussi longtemps que ce sera moi qui desservirai la chapelle de Saint-Dunstan ; ce qui, s’il plaît à Dieu, sera jusqu’à ce que je change ma robe grise contre un linceul de gazon. Mais, allons, remplis ton verre, car il faudra quelque temps pour accorder la harpe, et il n’y a rien qui relève la voix et aiguise l’oreille comme une coupe de bon vin ; quant à moi, j’aime à sentir le jus du raisin au bout de mes doigts avant que de faire résonner les cordes de ma harpe[1].

  1. Tous nos lecteurs, si peu versés qu’ils soient dans les vieilles