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IVANHOÉ.

XXXIII

Les traits de l’abbé captif et ses manières offraient un mélange fantasque d’orgueil blessé, de fatuité chiffonnée et de terreur évidente.

— Eh bien ! qu’est-ce donc, mes maîtres, dit-il d’un ton de voix où l’on reconnaissait ces diverses émotions, que signifie une telle conduite ? Êtes-vous des Turcs, êtes-vous des chrétiens, vous qui traitez ainsi un homme d’Église ? Savez-vous ce que c’est que de manus imponere in servos Domini ?[1] Vous avez pillé tous mes coffres, déchiré ma chape de dentelles brodées, qui était digne d’un cardinal. Tout autre à ma place aurait déjà eu recours à son excommunico vos[2] ; mais je suis clément, et, si vous me rendez mes palefrois, si vous relâchez mes frères, que vous restituiez mes coffres, si vous vous hâtez d’envoyer une centaine de couronnes pour être dépensées en messes au maître-autel de l’abbaye de Jorvaulx, et que vous fassiez vœu de ne pas manger de venaison jusqu’à la Pentecôte prochaine, il pourra se faire que vous ne m’entendiez plus parler de cette folle espièglerie.

— Révérend père, dit le chef des outlaws, j’apprends avec peine que vous avez subi, de la part de mes hommes, un traitement qui mérite vos réprimandes paternelles.

— Un traitement ! répéta le prêtre enhardi par le ton doucereux du capitaine forestier ; ce traitement ne conviendrait pas à un chien de bonne race, bien moins à un chrétien, à plus forte raison à un prêtre, et par-dessus tout au prieur de

  1. Mettre la main sur les serviteurs de Dieu.
  2. Je vous excommunie.