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Page:Scott - Nain noir. Les puritains d'Ecosse, trad. Defauconpret, Garnier, 1933.djvu/155

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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

ne sont pas obligés de garder le silence sur le sermon que vient de prononcer cette vieille puritaine.

— Mon bon brigadier ! s’écria l’avare, personne dans ma maison ne voudrait vous offenser.

— Eh bien, vous allez l’entendre elle-même donner son témoignage. — Retirez-vous, dit-il à Cuddy qui se plaçait devant Mause, et laissez parler votre mère ; elle a sûrement eu le temps de recharger ses armes depuis son premier feu…

— Seigneur mon Dieu ! noble monsieur, dit Cuddy, qu’est-ce que la langue d’une vieille femme, pour faire tant de bruit de ce qu’elle peut dire ? Mon père ni moi n’y avons jamais fait attention.

— Paix ! mon garçon. Vous m’avez l’air plus malin que vous ne voulez le paraître. — Allons, bonne dame, montrez que vous savez rendre un brillant témoignage. Vous voyez que votre maître en doute.

Mause n’avait pas besoin d’être stimulée pour se donner carrière. — Malheur, s’écria-t-elle, aux complaisants et aux égoïstes charnels qui souillent et perdent leur conscience en consentant aux vexations de l’impie, et en donnant le Mammon de l’iniquité aux fils de Bélial, pour faire leur paix avec eux. C’est une complaisance coupable, une lâche alliance avec l’ennemi ; c’est le péché que commit Menaham à la vue du Seigneur, quand il donna mille talents au roi d’Assyrie pour que sa main le secourût, deuxième livre des Rois, xve chapitre, verset 49 ; c’est le crime d’Abab, quand il envoya de l’or à Téglath-Phalazar, voyez le même livre des Rois, verset 8 ; et si Ézéchias lui-même fut regardé comme apostat pour s’être soumis au tribut de Sennachérib, même livre, chapitre xviii, versets 14 et 15, quel nom méritent les hommes de la génération actuelle, qui paient les impôts et les amendes à d’avides publicains, qui se laissent extorquer par des prêtres mercenaires, et qui offrent des présents à nos oppresseurs ? ils sont comme ceux qui jouent aux dés avec eux, qui préparent une table pour leurs soldats et leur offrent à boire.

— Voilà une belle doctrine pour vous, monsieur Morton ! s’écria Bothwell ; reste à savoir si elle sera du goût du conseil privé. Je crois que nous pourrons en retenir la plus grande partie dans notre mémoire sans avoir besoin de la plume et des tablettes comme ces fanatiques en portent à vos conventicules. — Vous l’avez entendu, André, elle blâme ceux qui paient les impôts au roi.

— Oui, pardieu ! et elle a juré que c’était péché que d’offrir un pot de bière à un soldat ou de l’inviter à se mettre à table.

— Vous avez entendu, c’est votre affaire, dit Bothwell à Miln-